La famille WU est une famille de guerriers d'origine Mongole, disposant d'une tradition martiale spécifique, et qui, progressivement, est passée du nord de la chine à Pékin au siècle dernier, puis à Shanghai dans les années 30 et pour certains à Hong Kong suite à la mainmise communiste sur le pays. C'est dans la capitale de l'empire que WU Quan you (1834-1902) apprit le taijiquan avec YANG Lu Chan. A cette époque l'influence de l'Occident et sa supériorité militaire se faisaient lourdement sentir. Dans la Chine des Qing et bientôt dans la jeune république chinoise le besoin d'un renouveau spirituel et martial se fit jour. C'est ainsi que des techniques auparavant secrètement transmises au sein d'une même famille ou d'un même clan commencèrent à être diffusées plus ouvertement et plus systématiquement. YANG Lu Chan lui-même tenait l'essentiel de son savoir martial interne de la famille CHEN. A partir de cette époque et durant longtemps les familles WU et YANG furent très liées et échangèrent profondément sur le plan martial. C'est ainsi que YANG Chen Fu (1883-1936) venait souvent s'entraîner avec WU Jian Quan (1870-1942) en particulier au Tui Shou (poussée des mains) et au Da Lu (grand enchaînement). WU Jian Quan était le fils de WU Quan You tandis que YANG Chen Fu était le petit fils de YANG Lu Chan. Au début du siècle on ne distinguait pas encore le style WU du style YANG. Ce furent précisément WU Jian Quan et YANG Chen Fu qui modifièrent chacun à leur manière le taijiquan hérité du XIXième siècle, en relevant les postures, en homogénéisant l'enchaînement et en supprimant les techniques trop difficiles pour en faire un outil d'entraînement populaire en même temps qu'un vecteur des vertus les plus profondes de la culture chinoise. Ce sont eux qui sont véritablement à l'origine des deux courants de taijiquan les plus répandus en Chine et dans le monde : le style YANG - qui présente le plus grand nombre d'adeptes et la plus grande diversité d'écoles - et le style WU.
WU Jian Quan reçut, dès son plus jeune âge, une éducation martiale poussée de la part de son père. Comme tout guerrier mongole, peuple des steppes du nord, c'était un cavalier émérite et on raconte qu'il était capable faire le poirier sur la croupe d'un cheval au galop. Il est certain que son habileté et sa compréhension des arts de combats lui procurèrent une perception corporelle exceptionnelle et une grande intelligence du taijiquan ce qui lui permit de l'enrichir efficacement.
En 1928 WU Jian Quan déménagea de Pékin pour s'établir à Shanghai. En 1935 y fut fondée « l'association du taiji de Jian Quan » qui eut pour objectif de diffuser le style qu'il avait mis au point. Au décès de WU Jian Quan sa fille aînée WU Ying Hua reprit la direction de l'association en compagnie de son mari MA Yue Liang. Ce dernier, Grand Maître réputé dans la Chine entière, notamment pour son extraordinaire poussée des mains, fut pour beaucoup dans le rayonnement qu'eut par la suite le style WU. C'est lui, en particulier, qui poussa son fils cadet MA Jiang Bao - le seul de la fratrie à vivre de l'enseignement du taijiquan - à venir s'installer en Europe où il enseigne aujourd.hui. Mort en 1998 à 96 ans, MA Yue Liang était un maître incontesté qui pratiqua et enseigna son art jusqu.à la fin de sa vie.
WU Jian Quan eut aussi deux fils, WU Gong Yi et WU Gong Zhao. Le premier enseigna longtemps à Hong Kong où il fut très réputé pour ses qualités martiales dues pour une bonne part à sa connaissance intime de formes et exercices gardés secrets dans le cercle des familles YANG et WU mais aussi à sa puissance mentale. Le second dut purger 20 ans de prison communiste pour avoir été instructeur dans l'armée de Jiang Jie Shi (Chiang Kai Shek). Leur enseignement se diffusa largement en Chine du sud et outre-mer.
On peut distinguer actuellement deux courants principaux du taijiquan de style WU. Le premier est issu de l'association de Shanghai et directement hérité de WU Jian Quan ; il est largement répandu en Chine continentale et on le trouve aussi aux Etats Unis, en Nouvelle Zélande, en Indonésie, aux Philippines et en Europe. Le second est issu de l'enseignement de WU Gong Yi ; il est surtout présent dans le Guangzhou, à Hong Kong et dans les communautés chinoises asiatiques comme Singapour et la Malaisie mais aussi maintenant en Amérique, particulièrement au Brésil et au Canada.
MA Jiang Bao, petit fils de WU Jian Quan, représente aujourd.hui l'école de Shanghai en Europe. Il continue d'affiner et de mettre en valeur les principes structurels hérités de sa famille. La progressivité de son enseignement est extrêmement cohérente avec les principes qu'il souhaite transmettre. Tout élève commence par la longue forme lente avant d'aborder le tuishou ; il continue par les armes tout en perfectionnant le tuishou et la longue forme lente avant d'arriver à la forme rapide et aux exercices les plus avancés. La vision du taijiquan que présente MA, m'apparaît à la fois très subtile et absolument concrète tandis que son enseignement quotidien reste très traditionnel : la pratique avant tout...
Mais rien n'est moins rébarbatif que ses cours : débusquant les erreurs - souvent partagées par beaucoup - , il se met parfois à les mimer déclenchant régulièrement par ses expressions l'hilarité générale. Impressionnant par la puissance qu'il dégage, en particulier dans son taijiquan, il règne cependant autour de lui une atmosphère bon enfant et ses étudiants avancés lui vouent une grande affection...
Extrait du livre "Taijiquan style Wu" de Vincent Béja
WU Jianquan (1870- 1942)
Fils de Quan You (1834-1902), militaire Mandchou qui fut le disciple de YANG Lu Chan. C'est le véritable fondateur du style WU actuel. Lors du séjour de YANG Chen Fu à Shanghaî, il contribua à l'entraînement de ce dernier dont il était le "frère aîné dans la pratique". YANG Chen Fu, petit-fils de YANG Lu Chan, devint par la suite le fondateur du Tai Ji Quan de style YANG moderne.
WU Jian Quan fonde en 1935 à Shanghaï l'association de Tai Ji de Jian Quan.
MA Yuehliang
Gendre de WU Jian Quan (il est le mari de la fille aînée de ce dernier, WU Ying Hua), médecin et fils d'un général mandchou. Avec sa femme, il anime l'association de Shanghaï. Très réputé dans le monde des arts martiaux chinois, tant pour ses qualités huamines que pour sa poussée des mains, il a très largement contribué à populariser le taï ji quan de style WU. Décédé en 1998, il laisse l'association sous la conduite de son fils aïné, MA Hai Long. Avec sa femme, il a écrit un ouvrage traduit en anglais : "WU Style TAICHICHUAN - Forms, Concepts and Application of the Original Style" ainsi qu'un ouvrage sur la poussée des mains réalisé avec son élève Zee Wen : "WU Style TAICHICHUAN TUISHOU (PUSH HANDS)"
MA Jiangbao
Fils de MA Yueh Liang et de WU Ying Hua, il a longtemps vécu en Hollande et enseigné le Tai Ji Quan dans toute l'Europe du nord. Son Tai Ji est épuré, direct, précis. A l'aide d'un de ses élèves, il a réalisé en langue allemande un livre magnifique et très détaillé sur la forme longue : "WU-STIL TAI CHI CHUAN". Il est aujourd'hui retiré à Shanghaï.
WANG Hao Da
Disciple de MA Yueh Liang, il a été son élève direct durant 22 ans. Avant son décès en mai 2002 (à 78 ans) il enseignait depuis quelques années tant en Chine qu'aux Etats-Unis et en Europe. Son Tai Ji Quan était particulièrement vif et sa poussée des mains remarquable.
WU Tu Nan
Contrairement à son patronyme, WU Tu Nan n'appartient pas à la famille WU. Il a appris le Tai Ji Quan auprès de WU Jian Quan puis de YANG Shao Hou (fils adoptif de YANG Ban Hou, lui-même fils de YANG Lu Chan). Enseignant, il n'a jamais eu besoin ni désiré vivre du Tai Ji Quan mais son autorité dans l'art ainsi que ses écrits ont influencé et inspiré de nombreux pratiquants. Il est aussi fameux pour avoir vécu jusqu'à un âge avancé (105 ans).
Article tiré de Co http://www.presence-tao.fr
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