Wong Shun Leung // Le véritable Maitre de Bruce Lee ?

Wong Shun Leung // Le véritable Maitre de Bruce Lee ?

Tout le monde connait Bruce Lee mais peu s’intéressent de savoir d'où vient réellement son enseignement. Beaucoup pourraient citer Ip Man (Yip Man), Grand Maitre de Wing Chun, notamment grâce aux nombreux films et séries qui ont été tournés sur sa vie (Plus ou moins édulcorés d'ailleurs), mais peu vous parleront en revanche de son disciple, Wong Shun Leung qui pourtant, aura eu une place prépondérante dans l'apprentissage de Bruce. Il ne s'agit pas ici de s'attaquer au mythe (un jeu souvent périlleux tant la légende a souvent surplombé la réalité), mais de rétablir une certaine vérité en mettant l'éclairage sur ce Maitre de Kung fu qui aura beaucoup compté dans la vie de Bruce mais aussi dans l'histoire du Wing Chun. 



Wong Shun Leung est né à Hong-Kong et, comme c'était le fils aîné d'un docteur, il grandit parmi les os brisés, les plaies et les bosses... A huit ans, on pouvait le trouver assis dans un coin d'un cinéma de quartier en train de regarder le dernier film muet de Kung Fu. Il se trouvait que son père était un ami intime de Chan Wah Shan le tout premier instructeur de Ip Man. Son père et son grand père lui racontèrent comment Chan Wah Shan, déjà vieux avait vaincu un jeune combattant de Fat Shan.

C'est peu après que Wong Shun Leung découvrit son hobby : Lutter. On le trouvait toujours en train de combattre à l'époque, et de nombreux amis lui conseillèrent d'apprendre sérieusement le Kung Fu.

Entre 15 et 16 ans, Wong essaya plusieurs écoles de Kung Fu, du Tai Chi Chuan à la boxe occidentale. Il eut toujours de la considération pour la boxe car elle lui paraissait une méthode de combat très adaptée à la rue car les boxeurs apprennent à encaisser dés le début et à attaquer malgré les coups plutôt que de jouer avec les mains de l'adversaire comme le font beaucoup de Kung Fu.

Un jour à 17 ans Wong s'en alla chercher son voisin Law Bing au Kwoon de Ip Man. Quand il arriva, les élèves pratiquaient le Chi Sao. La 1ere impression de Wong fut que cette méthode lui paraissait fort loin d'être utile. Wong commença à la comparer avec la boxe occidentale. Comme on s'y attendait, un des élèves défia Wong. Wong gagna. Ip Man lui demanda s'il voulait se mesurer avec un de ses plus anciens élèves... avec son neveu par exemple. Wong accepta. Cette fois l'adversaire était plus fort mais Wong le maitrisa. Ip Man décida que cela suffisait et qu'il lui fallait, malgré ses 56 ans, lutter contre Wong. La stratégie de Ip Man était beaucoup plus élaborée que celle de Wong et il l'accula dans un coin. Ip Man attaqua Wong, le déstabilisant et contrôlant ses attaques. Wong resta abasourdi de la rapidité et de la force de Ip Man. Il savait qu'il venait de rencontrer un maitre et n'hésita pas une seconde pour lui demander de l'accepter comme élève.

Après avoir termine l'étude complète du système avec Ip Man, il enseigna pour Ip Man au lieu d'aller ouvrir son école comme beaucoup, ce qui fit de lui celui qui resta le plus longtemps avec Ip Man et eut ainsi la possibilité d'apprendre en profondeur les concepts et théories du Wing Chun, et d'absorber tout ce que son sifu avait à offrir. A la mort de Ip man il aurait pu réclamer sa place de chef d'école, mais il préféra enseigner et laisser son habilité et sa connaissance profonde du Wing Chun parler pour lui.

Ce fut lorsqu'il enseigna pour Ip man, que Bruce Lee devint son élève, d'ailleurs, Lee pria Wong de devenir son tuteur ce que Wong refusa mais Bruce imagina un subterfuge. Avant le cours il s'asseyait d'un air dépité sur les marches devant l'école de Wong et expliqua aux autres élèves que Wong n'était pas là et obtint ainsi des cours privés. Lorsque Wong eut vent de son subterfuge, Lee se présenta au cours suivant avec deux yeux au beurre noire, en fait il avait réussi à avoir sa leçon privée. Ce qui amusa beaucoup les autres élèves.  

Wong Shun Leung fut le plus remarquable des maitres de Wing Chun. Il obtint son "grade" là ou on se fait une vraie idée de son niveau....dans les rues. Il fut celui qui mit le Wing Chun sur le devant de la scène en combattant lors de challenges (beimo), avec un support publicitaire efficace, contre des combattants de différents styles, y compris un boxeur russe de 120kg du nom de giko. C’est d'ailleurs pendant cette période que wong introduisit Bruce Lee aux challenges, le coachant et l'encourageant à ne pas abandonner lorsque celui ci semblait découragé. Wong Shun Leung déclara : "Apres avoir appris les concepts du Wing Chun, j'ai souvent eu l'occasion de les tester et en expérimentant ces concepts j'ai pu découvrir mes limites à les appliquer et les comparer avec ceux d'autres disciplines, ce qui me permis d'évoluer.».

Bruce Lee lui accordait des centaines de victoires. Selon Jesse Glover, 1er élève de Lee aux U.S.A, wong fut l'homme le plus influent sur le développement de Lee. En 1959 Bruce lui disait : "wong est le meilleur combattant du Wing Chun, il a vaincu tous les challengers." La vision de sifu wong Shun Leung et son enseignement était très direct sans fioritures ni magie. 

Ses cours n'était orienté que sur le combat et l'étude du système Wing Chun afin de combattre mieux ou comme il disait: « afin de perdre moins ». Il ne croyait pas au chi ni aux " dim mak " (touches mortelles). Toute personne ayant été son élève ou le connaissant sait bien qu'il aimait casser les mythes qui donnent aux réels pratiquants une mauvaise image. Il déclara d'ailleurs dans un magazine anglais "combat magazine». Les artistes martiaux ne sont pas des gens qui apprennent des techniques secrètes, de la magie, ou à développer leur chi pour devenir des moines aux pouvoirs magiques, comme on peut voir dans les films. Dans le même article, interviewé par son élève, le représentant en Australie David Peterson, (article prochainement disponible dans son intégralité en anglais dans notre site (voir le liens "articles"), il déclara qu'un jour, lorsqu'on lui demanda si les dim mak existaient en wing Chun, il répondit en riant: "vous risquez de vous tuez si vous vous touchez", et sur un ton plus sérieux il rajouta: "de plus si une personne bouge vite, comme c'est généralement le cas dans un combat, il est pratiquement impossible de frapper avec précision des zones si petites". Il déclara aussi : " Le wing Chun est une arme sophistiquée, rien d'autre, c'est une science de combat dont le but est d'annihiler votre adversaire le plus rapidement possible.».

Il considérait le Wing Chun comme étant une science et non pas un art. Il avertissait ses élèves du risque de copier le sifu, car si vous ne faites que copier vous ne vous exprimez pas et de ce fait ne vous améliorerez pas. Il ne suggérait pas non plus que l'élève aille inventer sa manière de faire, il pensait qu'un sifu devait enseigner et pratiquer les concepts exactement tels qu’il les avait appris, ceci afin de préserver la pureté du système. Mais chacun étant différent il enseignait d'une manière réaliste en passant l'essence du Wing Chun dans ses concepts et théories, laissant ainsi l'élève libre de s'exprimer et d'utiliser les techniques.

L'anecdote suivante montre bien cette idée et que pour lui tous les moyens étaient bon pour passer son message: un jour que nous nous entraînions a Hong Kong, son élève allemand Ernest Hofer était présent et sifu wong lui faisait une calligraphie (sifu wong était un calligraphe de réputation mondiale) sur laquelle il avait écrit: "Toujours apprendre est néfaste car on ne pense pas, et trop penser n'est pas bon car on n'apprend pas».

Les citations suivantes sont tirées d'une interview de sifu wong Shun Leung, conduite par Mr Paul Withrod. Ces citations donnent une idée assez précise de sa vision du Wing Chun et comment il l'enseignait: "Beaucoup de styles insistent trop sur le travail des formes et d’enchaînements de techniques préétablies. Les concepts du Wing Chun ne permettent pas cette méthode, les théories du Wing Chun ne permettent pas les techniques fixes ou chorégraphiées. Beaucoup d'instructeurs insistent trop sur les exercices (drills en anglais) car ils ne comprennent pas comment appliquer les concepts du Wing Chun. Ils ne savent pas apprécier la théorie qui crée la technique."-"beaucoup de pratiquants de Wing Chun ne savent pas combattre. Ils ont la fausse idée que le chi Sao sert à vous enseigner à emprisonner (trapping hands) ou à coller les bras de votre adversaire. C'est une erreur car le chi Sao sert à développer votre habilité à continuer votre attaque si celle ci a été détournée".


Lors d'une autre interview sur le site : wingchunkuen.com on lui demanda quels drills (exercices) pratiquaient-ils a Hong Kong : il répondit: "nous ne pratiquons pas de drills ou de techniques préétablies, nous faisons chi Sao et construisons à partir de là". Wong Shun Leung est un exemple parfait de l'homme qui ne fait qu'un avec son art. Ayant commencé par être un talentueux combattant il étudia les aspects tant physiques que mentaux de son système et finalement se fondit spirituellement avec l'art au point d' "être" le wing Chun. Il a appris à connaitre ses limites et par suite celles des autres. Sa philosophie, dénuée de fioritures, est comme une vieille épée qui semble inoffensive jusqu'a ce qu'on ressente la lame acérée dans sa propre chair.

Peu après notre retour de Hong Kong, nous reçûmes un appel de Ernest hofler, un des représentants allemand de sifu wong Shun Leung, nous disant que wong était en Allemagne pour un stage et qu'il voulait que nous le rejoignions. Wong nous invita et paya nos billets ainsi que l'hôtel et tous les frais. Ce fut une expérience inoubliable que de l'assister dans son stage, et nous étions très heureux de voir sifu wong Shun Leung en Europe de plus il était venu avec rusper Patel, un de ses plus proches élèves de Hong Kong, et aussi un très bon ami qu'il nous faisait très plaisir de revoir.

Apres le stage sifu wong Shun Leung vint à Paris avec nous, et nous eûmes la chance de pouvoir encore travailler sous sa direction en privé et bénéficier de son immense connaissance du système Wing Chun. Nous voulûmes en faire profiter les autres pratiquants et faire un article sur lui, ce qui aurait été le 1er en France (il faut savoir que wong n'a jamais donner d'interview à un journal français, il n’y a eu que des traductions d'articles données dans des magazines étrangers), malheureusement les journalistes que nous avons contacté a l'époque n'ont pas été assez rapide, ou n'étaient pas intéressés.Les journalistes français ne devaient pas savoir ce qu'est un "scoop".

Nous le laissâmes à l'aéroport et ne devions malheureusement ne plus le revoir. En effet quelques mois plus tard alors que nous préparions notre prochain séjour a Hong Kong, rusper nous téléphona pour nous annoncer la terrible nouvelle : sifu était dans le coma. Un coma dont il ne devait pas se réveiller. Avec son départ, le monde des arts martiaux a perdu un grand homme. Nous le remercions pour sa générosité et pour ce qu'il a partagé avec nous, et ferons de notre mieux pour préserver sa vision si clair et sans détour du Wing Chun.


 

Source www.ecolebase.com


 

Wong Shun Leung & Bruce Lee

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Wong Shun Leung parle de Bruce Lee

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